« Les startups, développées en « Techno Kent » avec peu de charges fiscales, employant une main-d’œuvre bien formée et peu chère, parfois étrangère comme moi-même, et exportant ses produits à l’étranger en dollars ou en euros, ces entreprises, ont un bel avenir devant-elles. Peu de coûts, des gens éduqués et de qualité et des ventes sur des marchés porteurs en Asie Centrale ou en Europe, que demander de plus ? . »

Pouvez-vous nous
parler de votre parcours ?

Auparavant chez GDF Suez en affaires publiques, j’ai voulu aller
voir le monde de l’entreprise hors d’une grande structure organisée. L’entrepreneuriat
et surtout l’entrepreneuriat en Turquie m’est apparu comme une grande aventure pleine
de défis et je m’y suis lancé. Notre startup, V-Count, est turque et développe des
solutions logicielles pour l’analytique des ventes des entreprises de
distribution.

Un français dans une
startup turque, cela fait-il la différence ?

Le problème est que peu de managers ont cette vision de la valeur ajoutée que peut apporter un jeune français bien formé dans une entreprise turque. Il faut que le recruteur ait travaillé dans une grande entreprise internationalisée pour qu’il en saisisse pleinement les avantages potentiels.  

Par rapport aux
autres entrepreneurs européens, comment nous situons-nous ?

La communauté des « expats » français à Istanbul est
largement supérieure à celles des autres européens comme les anglais ou les allemands.
Clairement l’esprit entrepreneurial en Turquie, actuellement, est porté par des
français.

Comment a été l’intégration ?

Nous avons une unité géographique commune avec la méditerranée.
Cette culture méditerranéenne nous rapproche et facilite l’intégration.

Un élément conjoncturel assez dommageable est que la plupart des jeunes cerveaux turcs se voient à moyen terme. Il y a un turn over important, accéléré par les événements politiques de ces dernières années. Il est difficile de construire des liens forts en Turquie quand la plupart de ses connaissances ou amis quittent le pays au bout de 2 ou 3 ans ou simplement rêvent de « ficher le camp ».

Est-il facile de
travailler en PME ou en startup turque ?

Il subsiste encore un univers très protectionniste et une certaine méfiance. Par exemple : il faut un ratio de 5 travailleurs turcs pour 1 travailleur étranger dans les entreprises. Intégrer des petites structures peut donc être compliqué en Turquie si la place ou les places ont déjà été prises. Typiquement, j’ai manqué un VIE à cause de cette règle.

Les formalités administratives
sont-elles lourdes pour « l’expat » fraichement débarqué en Turquie ?

L’administration turque est calquée sur celle de la France dont oui, c’est lourd mais pas insurmontable. Souvent ce sont soit les entreprises qui vous prennent en charge ou bien des sociétés de conseil. Attention on peut parfois se voir confronté à des règles ubuesques et se retrouver du jour au lendemain en semi-liberté dans le pays, ça m’est déjà arrivé et c’est assez stressant, je ne vous en dis pas plus.

Les turcs ont-ils l’esprit
entrepreneurial ? L’Etat favorise-t-il cette dynamique ?

De manière générale, les turcs sont très entrepreneurs, de l’électricien
ou vendeur de légume, ils ont tous plein d’idée de boites, tout le temps. Cet
esprit d’entrepreneur est complétement indépendant de l’état, ils y vont sans
trop se poser la question si l’Etat peut les aider. Lorsqu’on passe la
frontière en Grèce, ce n’est plus du tout la même ambiance.

Au niveau des mécanismes d’aides de l’Etat pour l’entrepreneuriat, cela dépend des secteurs mais clairement, à mon sens, il n’y en a pas assez. L’Etat s’est longtemps basé sur une croissance « cheap » et mauvaise centrée sur l’immobilier. Malheureusement ce système s’est retrouvé en crise et l’Etat a commencé à se rendre compte qu’il était plus judicieux d’investir dans la société des savoirs. Les choses commencent à bouger. Dans le secteur que je connais à savoir le développement logiciel et numérique, ils sont très avancés et performants. Si la startup a un bureau dans un « Techno Kent » alors elles bénéficient d’avantages fiscaux. Et beaucoup d’entreprises qui aujourd’hui fonctionnent bien sont passées par là.

L’import / export
est-il compliqué entre la France et la Turquie ?

En théorie, nous sommes sensés avoir une union douanière
entre la France et la Turquie mais en pratique il peut y avoir des frais
douaniers pour certaines solutions logiciels. Avec la dévaluation de la livre turque,
le marché turc est devenu moins attractif pour beaucoup d’entreprises
françaises qui exportaient en Turquie. A part certains créneaux très spécifiques
ou quelques grandes entreprises avec une implantation locale ancienne comme
Renault ou Schneider Electric, l’écosystème actuel favorise les technologies
locales et attire peu les étrangers.

A l’inverse, les startups, développées en « Techno Kent » avec peu de charges fiscales, employant une main-d’œuvre bien formée et peu chère, parfois étrangère comme moi-même, et exportant leurs produits à l’étranger en dollars ou en euros, ces entreprises, ont un bel avenir devant-elles. Peu de coûts, des gens éduqués et de qualité et des ventes sur des marchés porteurs en Asie Centrale ou en Europe, que demander de plus ? *rires*

En termes de financement et de contrôle de la startup, existent-ils des mécanismes de protection pour entrer dans le capital quand on est étranger ?

De ce point de vue-là c’est assez libéral, il n’y a aucun problème pour entrer dans le capital de la startup lorsqu’on est étranger.

Deux avantages pour
créer sa startup en Turquie ?

  1. Les turcs sont un peuple entreprenant et travailleur, ce qui permet, si on tombe sur les bonnes personnes de monter des projets intéressants
  2. Géographiquement la Turquie est un pays très central, ce qui constitue un bon tremplin pour de grands marchés voisins

Deux inconvénients
pour créer sa startup en Turquie ?

  1. Une mentalité de management encore très arriérée
    car très verticale et hiérarchique
  2. Un pays encore assez fermé avec notamment des
    pratiques protectionnistes problématiques

Quel conseil,
recommandation donneriez vous au jeune entrepreneur français désireux de monter
sa startup en Turquie ?

Les secteurs du tourisme, du solaire, de l’environnement ont
de belles heures devant eux, il y a, selon moi, des créneaux à prendre !

Leave a Reply

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *