Introduction : 

Au milieu des multiples tours de bureau où des milliers de personnes se rendent au travail tous les jours, nous avons rendez-vous dans un nouvel espace de coworking avec Tessa. Nous sommes sur le point de découvrir comment elle a décidé d’apporter un concept nouveau dans la ville pour nourrir tous ces travailleurs. Tessa a co-créé Berlioz il y a cinq ans après avoir décidé de changer de voie radicalement. Berlioz propose pour des réunions de travail et événements d’entreprises, un repas complet servi dans une box élégante, pratique et raffinée. En nous baladant dans les rues de Mexico, cela ne nous a pas étonné de savoir qu’une demande pour ce type de service existait, pourtant, Aujourd’hui Berlioz est la seule entreprise de la ville à proposer ce service. Découvrez l’entretien avec Tessa, une jeune entrepreneur pleine d’énergie et de vitalité qui voit en Mexico, une destination parfaite pour créer son entreprise. 

Découvrez également plus de choses sur Berlioz sur leur site internet : https://berlioz.mx/

L’entretien : 

Tessa, qui es-tu ? 

Je suis franco-mexicaine donc je suis née ici et mes parents aussi. Mon père a travaillé en Europe donc dès mon plus jeune âge j’ai vécu en France. J’ai grandi et fait mes études de droit à Paris mais une fois mes études terminées je me suis rendu compte que je ne voulais pas faire ça. A ce moment là mes parents m’ont dit de venir au Mexique car ça bougeait pas mal là-bas. Je suis donc venu au Mexique pour tenter l’expérience et essayer le droit pour voir si ça me plaisait plus ce qui n’a pas été le cas. A côté de cela j’ai toujours eu l’envie d’ouvrir un restaurant donc je me suis dis que je pouvais essayer de me lancer là-dedans. Donc j’ai commencé à m’intéresser à ça et puis je me suis rendu compte que tout ce que ça impliquait n’allait pas forcément me plaire, notamment le style de vie. Et c’est à ce moment là que mon père m’a dit que le working lunch ça n’existait pas à Mexico. Le working lunch c’est un service spécialisé dans la livraison de plateaux repas aux entreprises. Comme l’idée me plaisait et que la demande semblait exister alors que personne n’offrait ce service, j’ai décidé de me lancer à 100% dans ce projet. 

Quelles étapes pour te lancer ? 

J’ai d’abord arrêté mon travail d’avocat pour me consacrer à 100% sur ce projet. Puis j’ai commencé à faire des études de marché et de la prospection. En demandant pour savoir si le concept plaisait j’ai découvert que la demande était vraiment là mais que les clients avaient besoin d’avoir un produit entre les mains pour être sûr que ça leur plaisait. Donc pendant 5 mois j’ai essayé de développer un produit, j’ai embauché un chef pour travailler les menus. Moi je voulais pas vraiment faire un plateau repas classique; je voulais plutôt faire une box jolie dans cette vague de produits en box à la mode. En parallèle j’ai dû faire toutes les formalités concernant le dépôt de marque qui est ici assez facile et pas cher. A ce moment là je ne me suis pas trop posé la question de comment j’allais vendre le produit, je me suis d’abord dit que je faisais le meilleur produit possible et ensuite je verrai comment il se vend. Sauf que sans contact c’est difficile mais à ce moment là j’ai rencontré mon associée Anne, qui est française mais installée à Mexico depuis plus de 10 ans et qui a beaucoup de contacts de CEO notamment. 

Tu n’as pas eu peur de t’associer avec quelqu’un que tu ne connaissais pas vraiment ? 

Trouver le bon partenaire c’est difficile et quand on est associé c’est pire qu’un mariage ! Il faut prendre des décisions ensemble qui concerne le business, l’entreprise et sa structure et surtout être complémentaire. Moi je suis plutôt créative sur le concept, le produit et je sais ou je veux aller mais je n’avais aucune idée de comment j’allais vendre et Anne est très forte là-dedans. On se complète bien et on a la même vision des choses pour l’entreprise donc malgré une petite appréhension je savais que cette collaboration pouvait fonctionner

Comment tu as constitué ta box dans les recettes ? 

Berlioz c’est uniquement des recettes européennes. C’est entrée-plat-dessert avec des recettes plutôt tournée Europe et particulièrement méditerranéenne. En avançant on se rend compte que les mexicains adorent la nourriture mexicaine donc on est en train de travailler à l’élaboration d’une marque avec des recettes entièrement mexicaines. Donc c’est un nouveau concept qui est un peu comme une concurrence à Berlioz. 

La principale difficulté dans l’élaboration des recettes c’est que tout doit pouvoir se manger froid car en moyenne le client mange la box 2 à 3 heures après l’élaboration. Il faut aussi que cela soit pratique à manger donc les salades et les sandwichs c’est parfait. 

La spécificité aussi c’est que la personne qui commande ce n’est pas le client de la box car c’est la secrétaire souvent qui commande alors que c’est son chef et ses partenaires qui dégustent la box. Donc on essaye également de faciliter la vie de la secrétaire en proposant des menus tout fait. On peut faire des menus spécifiques et mixer les repas mais globalement c’est plus simple avec des menus pour tout le monde. 

A côté de cela c’était vraiment important pour moi dans le développement du produit de faire en sorte qu’il y ai 0 plastique dans la box et  que tout soit biodégradable. Le seul truc qui est en plastique mais ou on n’a pas encore trouvé de solution c’est la bouteille d’eau. En plus de cela il y une prise de conscience des entreprises qui apprécient vraiment que la box soit éco-friendly. 

Comment vous faites pour assurer la livraison ? 

L’avantage d’être en BtoB c’est que c’est des assez grosses commandes. Aujourd’hui on fait les livraisons en voiture, ça coûte un petit peu plus cher mais comme on le facture à l’entreprise cela n’est pas trop un problème. On avait le choix entre acheter une camionnette et faire les livraisons nous même ou alors utiliser les ressources déjà existantes à Mexico. Comme on a parfois plusieurs commandes en même temps à différents endroits de la ville la première option n’était pas viable donc on s’est tourné vers la deuxième option et les chauffeurs uber. C’est à dire que dès qu’on voyageait avec un chauffeur Uber qui nous plaisait on lui proposait de travailler et faire nos livraisons le matin et de continuer son emploi de chauffeur uber l’après-midi et le soir. Aujourd’hui on en a 4 et même si ce ne sont pas nos employés ça toujours les mêmes chauffeurs et c’est important parce qu’ils savent comment livrer une commande. 

Ce n’est pas trop dur de respecter les délais de livraison ? 

Au début on a eu beaucoup de mal parce qu’il y a pleins de choses qu’on n’a pas pris en compte : le trafic, trouver l’entrée des fournisseurs, passer la sécurité des immeubles, arriver chez le client etc. Donc au début on a un peu tatonner et c’est vrai que c’est embêtant quand on travaille en BtoB parce que quand le client nous donne une heure, si on arrive au milieu de la réunion c’est que la livraison est ratée donc le timing est très serré.

Vous n’avez jamais voulu faire du BtoC ? 

Berlioz on ne livre qu’en BtoB, c’est à dire qu’on ne fait pas de box individuelle sur un lieu de travail pour une ou deux personnes. C’est vraiment destiné aux réunions et événements d’entreprise. L’avantage de travailler en BtoB c’est que c’est l’entreprise qui paye et elle n’est pas très sensible au prix ; l’inconvénient c’est que sans contact c’est difficile de pénétrer le marché. 

On a essayé le BtoC parce que la tentation est forte tellement la demande est grande donc on a fait un essai il y a 2 ans dans une tour pendant 1 mois mais ça n’a pas fonctionné. On en a tiré la conclusion que la box est trop impressionnant pour attirer le client et le prix pas forcément adapté au BtoC. Il faudrait adapter le produit pour aller sur ce marché donc on a arrêté pour se concentrer sur le BtoB car c’est là où on est bon. Faire l’essai c’était génial parce que aujourd’hui on n’a plus le doute de savoir si on devrait se lancer dans le BtoC et ça nous permet d’être vraiment concentré sur ce qu’on fait.

Quel moyen de communication vous utilisez le plus ? le bouche à oreille, la prospection, un site internet ? 

Le site internet c’est la plateforme pour commander donc le client va forcément passer par notre site. On utilise la prospection aussi et on a une personne dédiée à appeler des clients, les rencontrer et présenter le produit. Le bouche à oreille ça marche bien aussi parce que dans chaque box on met une petite carte donc si ça a plu à un invité lors de la réunion il va peut-être nous passer une commande. Et enfin on fait de plus en plus de publicité digitale. 

Je ne saurais pas vous dire quel canal nous apporte le plus de client parce que c’est vraiment un mix des quatres même si c’est vrai que la prospection ça apporte un côté relationnel donc ça fonctionne plutôt bien. 

Est-ce que vous voyez la concurrence arriver ?

En voyant que ça marchait super bien et que le marché était vraiment très large on pensait qu’une concurrence allait pointer le bout de son nez mais pour le moment il n’y a aucun concurrent direct à Berlioz. C’est pour ça qu’on s’est dit qu’on allait en profiter pour monter notre propre concurrent parce que la demande existe. S’il n’y a personne je pense que c’est parce qu’il a des barrières importante à l’entrée dans le marché : il faut des contacts pour se faire connaître, des moyens assez importants et pour travailler en BtoB il faut une grande rigueur, notamment dans le timing, ce qui n’est pas forcément le point fort des mexicains en général. 

Avez-vous pensé à aller dans une autre ville ? 

On y pense en ce moment et l’année dernière on a par exemple travaillé dans des salons ce qui a bien fonctionné. Des personnes nous ont demandé si on était dans d’autres villes comme Puebla, Monterrey ou Guadalajara. L’idée d’aller s’implanter dans le futur dans une de ces villes, voir dans les trois et à terme dans d’autres pays est là, il faut simplement attendre d’être prêt. Mexico c’est tellement grand qu’il y a encore largement de quoi faire ici, on estime qu’on a touché environ 10% du marché donc on va d’abord (essayer) de conquérir Mexico avant d’aller ailleurs. 

En plus je trouve que Mexico c’est vraiment un eldorado pour les entrepreneurs, les gens sont vraiment réceptifs aux nouvelles idées mais il en manque donc il y a beaucoup de place pour créer quelque chose ici. La vie d’entrepreneur c’est réussir à organiser et mettre en place de la meilleure façon toutes les idées que tu as et je pense que Mexico m’offre un cadre idéal pour cela. 

Est ce que vous connaissez la limite de la demande à laquelle vous êtes capable de répondre ? 

On a déjà eu une demande pour 500 box, ça a été beaucoup de travail mais on a réussi à les livrer et dans les délais. En général on livre autour de 200 box par jour. Le plus gros problème c’est de stocker les commandes avant de les livrer plutôt que la capacité à les faire. Si on passait à 700 commandes par jour on devrait aller ailleurs mais aujourd’hui on peut répondre a des grosses demandes ponctuelles. On a eu une croissance plutôt organique jusque là, la demande n’est pas arrivée du jour au lendemain mais plutôt de façon constante ce qui nous a permis de nous adapter au fur et a mesure. L’avantage c’est que notre système est adaptable à l’augmentation de la demande, il nous faut juste plus de place, plus de cuisiniers et plus de chauffeurs. 

Est-ce difficile de trouver un local à Mexico ? 

Non c’est assez simple. On a déménagé pas mal de fois et à chaque déménagement on n’a pas mis plus de 3 semaines à trouver un autre endroit pour mettre notre cuisine. Forcément plus c’est grand et plus ça nous éloigne du centre sinon le prix augmente trop mais il n’y a aucun problème. 

Pour ce qui ne touche pas à la cuisine on utilise un espace de Coworking pour plusieurs raisons :

  • L’équipe de vente n’a pas besoin d’aller à la cuisine donc c’est plus pratique d’être vraiment au cœur de l’action plutôt qu’un peu excentré
  • C’est super pour l’image de l’entreprise et pour travailler, recevoir des clients, etc. 

Après c’est sur que si on pouvait être tous au même endroit ça serait mieux notamment Anne et moi parce qu’on avance plus quand on travaille ensemble mais pour le moment ça fonctionne très bien. 

Est-ce que vous avez eu des problèmes pour embaucher d’autres personnes ? 

Le premier secteur où on a embauché c’est pour la cuisine, on a rapidement été 5 et ça a été assez simple de trouver du personnel. Le plus gros challenge c’est de les garder car le marché est tellement gros que si ça ne leur plait pas ils peuvent partir du jour au lendemain. Pour lutter contre ça on a vraiment essayé de leur donner des bonnes conditions de travail. Ici les lois sur le travail sont super strictes donc ça a été super facile pour nous de donner des meilleures conditions qu’ailleurs. 

Pour le côté administratif ça n’a pas été difficile non plus. On connaît notre structure, on sait qu’on est une petite structure donc on est vraiment pas à cheval sur les diplômes mais plutôt sur les compétences réelles et surtout de savoir si la personne rentre dans l’esprit de Berlioz et si elle est prête à s’adapter à plusieurs tâches.

Conseil ? 

  • Moi j’ai décidé de ne pas écouter les gens car les gens ne croyaient pas en mon projet donc il faut savoir se faire confiance mais dans une certaine mesure car il faut s’avoir s’adapter et ne pas être borné. 
  • Savoir s’entourer avec ses employés et être reconnaissant du travail fourni par toute l’équipe, plus tu leur donnes et plus ils donnent à l’entreprise

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