« Je suis optimiste et je crois au futur de mon pays. Si l’on change l’état d’esprit et les comportements des enfants, tout est possible. La Bolivie peut être une terre d’opportunité. Aujourd’hui, il y a un vrai retard et j’ai la chance de pouvoir être là au bon moment pour changer les comportements de la nouvelle génération qui changera le futur de mon pays. »

 

Rencontre avec Daniella Garcia Moreno, fondatrice de Elemental.

Nous rencontrons Daniella, Bolivienne et fondatrice de Elemental.

 

Comment en es-tu arrivée là ?

« J’ai 34 ans, je suis bolivienne et j’ai passé toute mon enfance à Cochobamba, une petite ville en Bolivie. J’ai toujours eu une enfance très familiale, passant la majorité de mon temps à la maison en cuisinant avec ma mère. Puis, j’ai obtenu une licence en ingénierie à l’Université Mayor de San Simon à Cochabamba et j’ai décidé de partir et m’installer à La Paz. La Paz a changé ma vie. J’ai découvert la vie toute seule et mon âme d’entrepreneuse. Contrairement à Cochobamba qui est une petite ville, encore peu développée et rurale, la Paz est plus connectée et l’on trouve toutes sortes d’activités. C’est ici que tout à commencé et que je me suis lancée dans le domaine de l’ingénierie.

J’ai ensuite travaillé dans l’industrie des logiciels pendant près de 10 ans, pour de grosses entreprises comme Jala Soft et Mojix, entre autres. Je me suis rapidement rendu compte qu’il n’y avait pas assez de talents, de « techtalents » dans le domaine technologique et je ne comprenais pas pourquoi. Il y a une demande énorme, mais peu d’offres compétentes. En cherchant un peu mieux sur internet, je me suis rendu compte que ce problème n’était pas seulement local mais bien mondial. De nos jours la demande va s’accentuer de plus en plus avec les nouveaux métiers, contrairement à l’offre qui ne sera pas prête. Le fossé va s’agrandir. Il semble que peu de gens décident de choisir une carrière dans le domaine technologique ici, alors que la demande est immense. Pourquoi ?
Il faut donner envie aux jeunes et pousser le gouvernement à lancer la jeunesse dans les nouvelles technologies, le codage, la robotique, et autres, mais cela prendrait énormément de temps avant la mise en place de ces programmes, surtout en Bolivie (cela prendrait plus de 15 ans). Ce problème a été mon déclic, de là est né l’idée de ma start-up. »

 

Peux-tu nous parler de ta start-up Elemental ?

« J’ai commencé à lancer un programme en proposant des workshops pour apprendre à coder aux enfants. En créant celui-ci et en ajoutant de la publicité sur Facebook, j’ai voulu savoir si ce genre de programme pouvait intéresser les enfants, et si il y avait une opportunité de marché. Rapidement, les résultats sont apparus et cela a fonctionné, nous avons obtenu des retours positifs de 16 enfants. Le programme a vraiment bien marché grâce au côté ludique. Les enfants apprenaient à coder tout en jouant.

Nous avons donc voulu aller encore plus loin dans la démarche, en ajoutant une nouvelle branche, afin que les enfants apprennent à créer une page internet de manière simple et rapide. Ils devaient alors choisir le thème et sujet qu’ils préféraient, par exemple les jeux vidéos, le foot, les dessins animés … L’idée était ensuite de créer la page du site internet en prenant inspiration sur un thème qui leur tient à cœur.

Après le succès de ces deux programmes, de nouvelles hypothèses pour la mise en place de nouveaux cours sont apparues. Pourquoi ne pas leur proposer des cours d’électronique, de robotique ou de 3D ?

Nous avons alors décidé d’en créer un vrai business que j’ai nommé Elemental. J’ai par conséquent monté ma propre entreprise avec ma propre équipe. En 2016 l’aventure a véritablement commencé avec un groupe de professeur et une équipe. Cette expérience était un peu effrayante pour moi car je ne connaissais pas l’entrepreneuriat. »

 

As-tu réussi à lever des fonds pour la mise en place de Elemental ?

« Pas vraiment, j’ai en effet essayer de lever de l’argent auprès d’investisseurs en Bolivie. L’idée a toujours été reçu sous un tonnerre d’applaudissements, sans pour autant concrétiser. J’ai donc décidé d’investir moi-même en prenant toutes mes économies. Malgré ce véritable problème de confiance auprès des investisseurs et la difficulté de lever de l’argent, cette expérience me permet de me motiver à 100% pour aller au bout de mes rêves car je mets en risque.

Cependant, aujourd’hui, nous sommes arrivés au point où nous avons besoin d’investisseurs internationaux pour se développer plus rapidement. Nous savons aujourd’hui notre vision à long terme et nous pensons aujourd’hui à nous étendre à l’international. Nous allons donc appliquer auprès de Start-up chili à Santiago.

On sait que le marché est là, que les opportunités sont là. C’est le bon moment, mais nous attendons d’être plus forts et fin prêts pour enfin s’étendre à l’international en commençant par les pays frontaliers. Pour le moment, la compétition n’est pas encore présente en Amérique du Sud, bien qu’elle y soit en Amérique du Nord et en Europe, il faut donc en profiter. »

 

Quelles difficultés as-tu rencontré durant ton aventure entrepreneuriale ?

« Je vois trois principales difficultés depuis le début de cette aventure.

Lever de l’argent reste très difficile en Bolivie. Les investisseurs manquent de moyens et de confiance.  

Toutes les entreprises en Bolivie sont contraintes aux mêmes obligations. Par exemple, malgré notre petite taille, notre jeunesse et notre faible capital, nous avons le même pourcentage de taxes que les grandes entreprises qui gagnent 100 fois plus. C’est un véritable problème d’équité lorsque l’on souhaite monter sa propre entreprise.

Malgré une évolution notable au cours des dernières années, la place des femmes dans l’entrepreneuriat, surtout dans la technologie reste un problème, c’est compliqué. En Bolivie, seulement peu de femmes se lancent dans cette aventure, ce qui créé un fort clivage. Par conséquent, il est parfois difficile de se faire sa place et de gagner la confiance des investisseurs. »

Quels conseils pourrais-tu donner à un entrepreneur souhaitant se lancer en Bolivie ?

« Je pense avoir trois principaux conseils à partager.

Il faut être tolérant et être résilient avec soit même. Tout le monde dira autour de toi que cela prend du temps, que cela ne va pas marcher, en trouvant des aspects négatifs et des freins à chaque solution. Il faut trouver une idée pour laquelle on est passionné, afin de toujours se lever le matin avec une envie débordante. Il faut savoir s’acharner et ne jamais désespérer, car l’entrepreneuriat, c’est les montagnes russes émotionnelles.

Il faut savoir ses objectifs afin de se fixer des paliers et prendre le bon chemin avec les bons moyens, c’est un aspect fondamental. Cela permet de ne jamais désespérer, car on sait pourquoi on travaille matin et soir, et où l’on veut aller.

Comme dirait la plupart des entrepreneurs, il faut être acteur de sa vie en sachant ce qui nous épanouie. »

 

Qu’est ce qui te rend heureuse dans l’entrepreneuriat ?

« L’entrepreneuriat est un magnifique métier. Je peux gérer mon temps, être mon propre boss et diriger une équipe. Étant dans le domaine de la tech je peux avoir une impact dans le futur en changeant la vie et le comportement des enfants. Découvrir les talents des enfants et voir les opportunités de chacun, c’est absolument passionnant. »

Comment vois-tu l’avenir de ton pays ?

« Les choses s’améliorent en Bolivie. Il faut savoir que de nouveaux modèles existent et que les banques commencent progressivement à organiser des concours afin de lever un peu d’argent. Deux incubateurs et un accélérateur de start-ups sont actuellement en train d’ouvrir. De plus en plus de start-ups voient le jour et l’on sent que les choses s’accélèrent.

Je suis optimiste et je crois au futur de mon pays. Si l’on change l’état d’esprit et les comportements des enfants, tout est possible. La Bolivie peut être une terre d’opportunité. Aujourd’hui, il y a un vrai retard et j’ai la chance de pouvoir être là au bon moment pour changer les comportements de la nouvelle génération qui changera le futur de mon pays. Le gouvernement essaye de résoudre le problème auprès des jeunes à l’Université ou au travail mais ne part pas de la racine, autrement dit, les enfants. Si l’on change les comportements en initiant les enfants dès le plus jeune âge aux nouvelles technologies, cela changera définitivement les choses dans le futur. »

Merci Daniella !



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