“Je n’ai jamais autant appris ces deux dernières années en Argentine que pendant mes cinq ans à travailler en finance à Paris

 

Rencontre avec Augustin, fondateur de Gestorando

Après l’obtention de son Bac en filière ES, Augustin a étudié l’économie à la faculté de Bordeaux, avant de rejoindre une école de commerce, l’ISG Paris, en cursus national

 

Comment es-tu arrivé en Argentine ?

“J’ai rapidement réalisé que l’aspect international a manqué dans mes études. L’Argentine comme Eldorado ? Je ne le savais pas encore mais un élément déclencheur est venu changer mon quotidien. J’ai rencontré une Argentine aux États-Unis avec laquelle je me suis marié. Ce mariage est le moment clef de mon expatriation. Après 5 ans à travailler en finance dans l’optimisation fiscale, j’ai décidé de m’installer définitivement en Argentine.

 

Quelles ont été les difficultés d’un départ à l’étranger?

“Entre rêve et réalité, j’ai découvert une nouvelle vie, une nouvelle culture mais surtout une nouvelle langue que j’ai dû apprendre rapidement afin de m’intégrer plus au mieux.

Alors que ma vie parisienne et mon parcours professionnel ne présageait aucun stress, me voilà en Argentine où je dois repartir de zéro. Je me suis rendu compte que sans contacts et sans une bonne maîtrise de l’espagnol, ma situation professionnelle allait risquer de se compliquer…

De fil en aiguille, les rencontres s’enchaînent mais l’une d’entres-elles m’a marqué tout particulièrement: Gilles de Brossard, conseiller en investissement. Ce dernier, avec une simple question m’a permis d’ouvrir une porte, celle de l’entrepreneuriat.

Augustin, c’est quoi ton talent ?

Cette question est un des piliers pour pouvoir avancer, savoir dans quoi tu es le meilleur parmi les 1% des meilleurs. Il m’a fait comprendre qu’il y a deux manières de gagner de l’argent, soit en étant expatrié soit en créant sa propre entreprise.

En Argentine, le salaire n’est pas le même qu’en France ou qu’aux États-Unis pour un métier similaire. Le marché argentin est très spécial, la finance est décentralisée. Toute la finance passe par l’Uruguay.

 

Peux-tu nous parler de tes débuts dans l’aventure entrepreneuriale.

“J’ai décidé avant de lancer mon entreprise actuelle, de créer une marque de sac à main.  Après analyse des coûts et ayant conscience de l’inflation qui frappe régulièrement l’Argentine, j’ai au bout de 3 mois abandonné cette idée.

Il faut savoir que les Argentins manquent d’investissements dans les infrastructures car ils ne croient pas au futur, ils vivent au jour le jour.

Afin de rebondir rapidement et suivant les conseils de ma femme, j’ai décidé de venir travailler dans un espace de coworking. Les espaces de co-working sont propices aux rencontres et à l’échange d’idées ce qui est essentiel dans l’entrepreneuriat.

 

La naissance de l’idée… Un entrepreneur est souvent là pour résoudre un problème avec une solution miracle.

Voyant ma femme auto-entrepreneuse tentant avec difficultés de déclarer ses revenus sur le site des impôts, j’ai réalisé la complexité de ce dernier: le drame.

Il faut savoir qu’en Argentine, le processus pour les auto-entrepreneurs à été simplifié au maximum. Avec un seul impôt, on peut payer 5 impôts différents : TVA, impôt sur le salaire, impôt sur les entreprise, couverture sociale et retraite. Simple sur le papier mais en réalité très compliqué. L’Amérique du Sud et notamment l’Argentine est connue pour la complexité des démarches administratives . Les sites administratifs ne sont en règle générale pas mis-à-jour régulièrement et cela complexifient beaucoup de démarches. Par conséquent, chaque personne se fait aider par un comptable.

Devant cette incompréhension, j’ai décidé de créer un site wordpress avec de la pub sur internet. L’idée est de guider les auto-entrepreneurs avec l’aide de deux comptables.

Cette expérience m’a apporté de nombreux éléments de réponses. J’ai alors poussé plus loin mon idée en allant aux États-Unis pitcher mon business model devant des investisseurs du même domaine d’activité.

 

Peux-tu nous parler de ton entreprise Gestorando ?

“J’ai fondé Gestorando (le fait de gérer en Français). Ma start-up a été définitivement lancé il y a un an et compte aujourd’hui cinq salariés. L’objectif est d’aider les auto-entrepreneurs argentin à payer leurs impôts et répondre à leurs obligations légales.

En Argentine, les impôts sont payés mensuellement et selon la catégorie professionnelle. Il faut se re-catégoriser trois fois dans l’année selon ses gains. Il faut savoir que 80% des argentins ont au moins une fois dans leur vie pas payer leurs impôts, ce qui provoque entre autre l’inflation”.
L’inflation ne touche pas de la même manière tous les domaines d’activités. Par exemple, le pétrole est fortement indexé sur l’inflation tandis qu’internet l’est moins.

En Argentine, la majorité des contrats se font en dollars pour ne pas subir l’impact de l’inflation. Ici le billet vert est bien plus puissant que le pesos argentin. Tout passe par le dollar, tu vis en dollars car la majorité des entreprises vivent en dollars. Par conséquent, tous les Argentins font du change pour sécuriser leurs situations et épargner (ou plutôt thésauriser).

 

Quelles sont selon toi les difficultés pour monter son entreprise en Argentine ?

Il n’est pas si évident de monter son entreprise ici. Le Cuit : sans Cuit tu n’es rien… Le Cuit, c’est l’unique moyen pour prouver que son entreprise existe, il est toujours relié à une personne. Sans cuit, il n’est pas possible d’ouvrir de compte bancaire.

La motivation et le sang froid. Pour entreprendre en Argentine il ne faut pas avoir froid aux yeux et avoir une motivation à toutes épreuves.

 

Les opportunités de business sont elles présentes en Argentine ?

“L’Argentine est une véritable terre d’opportunités, les marchés ne sont pas encore mature et beaucoup de choses restent à faire.

Pour un Français ou un occidental venant s’expatrier, l’Argentine a l’avantage d’avoir une culture à la fois différente mais aussi très proche. C’est une terre d’immigration mais en tant que occidental, il est relativement facile de s’intégrer du fait d’une mentalité latine.

Les disparités sont cependant assez surprenantes. Il suffit de se balader dans les rues pour découvrir un mélange de tiers-monde avec tous les câbles téléphoniques, les trottoirs détruits, les problème de réseau et en parallèle, des infrastructures du futur comme l’espace de coworking. Il y a donc beaucoup d’envie et d’opportunités.”

 

Ton rêve ?

Je souhaiterais m’établir en Amérique du Sud, réussir et revenir en France plus fort.

Je n’ai jamais autant appris ces deux dernières années en Argentine que pendant mes cinq  années à travailler en finance. J’ai appris humainement et professionnellement en recevant des leçons de vie. En restant assis on avance pas. Il faut entreprendre, tenter, avoir des échecs et rebondir . On est jeune, on peut se le permettre. L’entrepreneuriat est la meilleure école pour apprendre à être polyvalent comme un couteau suisse. Cela permet de savoir apprécier les choses qu’on aimait pas avant, simplement parce qu’on aime ce que l’on fait.

 

En tant qu’expatrié, quel est ta vision du management ?

Je pense que mon modèle de management passe tout d’abord par l’écoute et la compréhension de la personne. Il faut savoir être un leader et non un chef. Autrement dit, il faut savoir inspirer les personnes qui nous entourent, et ne pas être derrière leurs dos. Ce n’est donc pas seulement du charisme. Un management efficace est l’une des clefs de la réussite.

Le fait de ne pas avoir l’espagnol comme langue natale à été un frein pour la transmission de certaines idées. La transmission des idées pour aller dans la même direction est primordiale et permet de pouvoir impliquer ses équipes pour atteindre un objectif commun.

En entreprise, le temps, c’est ce qu’il y a de plus précieux, il représente la plus grande variable car ce dernier ne peut jamais être rendu (contrairement à l’argent). Par conséquent, il faut le mettre sous la lumière pour prioriser les choses.

 

Aurais-tu des conseils à apporter pour une personne voulant s’implanter en Argentine ?

“Tester son idée : Comme toute start-up, il est préférable de tester son idée avant de monter sa startup, puis de constater.

Avoir l’envie, la détermination, le courage de se dire que ça va marcher et ne jamais désespérer car être entrepreneur c’est plus ou moins résoudre des problèmes toute la journée. Ce n’est pas toujours une partie de bonheur et il faut être réaliste.

On s’identifie la majorité du temps à des success stories, on rêve et ça nous inspire malgré le fait que 90% des entrepreneurs échouent.

Être polyvalent, même quand nous n’avons pas les compétences nécessaires, savoir s’adapter est primordial pour entreprendre. On doit sans cesse apprendre et tout faire tout seul.

Être expatrié et avoir lancer mon business à l’étranger m’a obligé de tout remettre à zéro et de savoir me remettre en question à tout moment.

 

Aurais-tu un achat de moins de 100 euros qui t’a marqué au cours des 6 derniers mois ?

“Avant les périodes de fêtes de Noël et mon retour en France, j’ai offert à chacun de mes employés un bon d’achat de 20 euros avec lequel ils pouvaient acheter ce qu’ils voulaient à condition que le cadeau puisse être utilisé par tous les membres de l’équipe. Cette idée a permis de créer en plus de la joie de chaque employé, une cohésion de l’équipe, du team building. Cela a amélioré la cohésion non seulement pour la start-up, mais aussi pour l’environnement autour de l’espace coworking”.


Merci beaucoup Augustin !

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