« Je me suis lancé dans un secteur et surtout un métier que je connaissais pas »

 

Rencontre avec Jean Gabriel, fondateur de Nais Cosmetica

 Nous rencontrons aujourd’hui Jean Gabriel, un français ayant fondé Nais Cosmetica.

 

Comment es-tu arrivé au Chili ?

« J’ai tout d’abord travaillé dans le conseil et rien ne me prédestinais à me lancer dans le monde de l’entrepreneuriat. Cependant, après plus de dix années dans ce secteur, j’ai décidé de prendre le large et de mettre mes compétences en stratégie opérationnelle au service des entreprises françaises désirant s’implanter dans les pays d’Amérique du Sud et j’ai réalisé que le Chili avait un potentiel énorme. Je me suis finalement rendu compte que ce marché est très voire trop spécialisé, et que les entreprises françaises n’ont que rarement besoin d’une expertise externe dans leur processus d’internationalisation.

Ensuite, j’ai pris une direction très différente, et comptant sur la renommée des produits français, j’ai décidé de me lancer dans la distribution de produits de beauté de la marque lyonnaise « La Rosée » au Chili. Encore une fois, j’ai sous-évalué les difficultés de mon ambition, et il s’est avéré qu’il n’y avait que très peu de places pour les nouveaux entrants dans les pharmacies, à moins de connaître les bonnes personnes. Pas facile quand on vient d’arriver et qu’on ne connait pas grand monde. Les pharmacies chiliennes ne prennent généralement pas de risques et proposent continuellement les mêmes produits. Un produit ne se suffit pas à lui-même, ou alors que très rarement, et cela est encore plus vrai au Chili.

          Finalement, je me suis rendu à l’évidence qu’il me fallait suivre la stratégie de vente la plus populaire au Chili dans le secteur de la cosmétique : la vente directe.

Par la suite, j’ai rencontré Colin, un français voulant lancer sa gamme de produits cosmétiques basée sur les huiles essentielles en collaboration avec un laboratoire français. J’ai donc intégré son offre dans mon réseau de distribution et nous sommes par la suite devenus associés. »

 

As-tu rencontré des difficultés dans la création de ton business ?

« La plus grande difficulté pour moi a été de m’engager pleinement dans un secteur, et surtout un métier que je ne connaissais pas. C’était un vrai challenge pour moi !

J’ai également éprouvé pas mal de difficultés administratives pour déposer ma marque. Ce qui est paradoxal, c’est que les règles sont claires et que ce n’est pas très compliqué, cependant toutes ces tâches sont extrêmement chronophages. Si c’était à refaire, je demanderai à une personne de confiance de mon entreprise de s’en occuper. Il est aussi compliqué d’avoir son propre compte en banque chilien lorsque l’on est étranger. Encore aujourd’hui, j’ai un représentant chilien qui se porte garant sur mon compte bancaire.

Ensuite, les relations avec les différents interlocuteurs du business, que ce soient les clients ou les fournisseurs, sont très particulières au Chili. Ils n’ont pas la même notion de la ponctualité et de la fidélité que nous pouvons avoir en Europe. Par exemple, la semaine dernière nous avions un rendez-vous avec cinq clients potentiels à deux heures de route de Santiago, et nous avons reçu une heure avant le meeting, un message nous informant qu’aucuns d’eux ne pourraient être présents. »

 

Quels conseils pourrais-tu donner à un entrepreneur désirant s’implanter au Chili ?

« Tout d’abord, et quel que soit le domaine, il faut un certain capital de départ afin de pouvoir vivre quelques temps avant que l’activité se développe et qu’elle puisse générer un revenu. Ensuite, selon le domaine d’activité, il faut un capital d’investissement pour lancer son business car les banques ne prêtent que très peu au Chili.

Ensuite, et comme partout il faut être très persévérant. Entreprendre ici, c’est être constamment dans un ascenseur émotionnel. C’est ce que j’appelle les “montagnes russes chiliennes”. Rien n’est jamais sûr ici et je vis, malgré le succès de mes produits, dans une incertitude permanente. D’autant plus que les chiliens ont tendance à ne jamais dire “non”, on pense souvent à tort qu’un contrat va aboutir, alors qu’il n’en n’est rien.

Dans l’entrepreneuriat en général, si tu arrives avec une idée fixe en tête et que tu t’obstines à la faire marcher coûte que coûte, tu vas droit au mur, rien ne se passera comme tu l’as prévue. C’est particulièrement vrai pour moi car j’ai commencé par conseiller des entreprises françaises au Chili, maintenant je travaille dans le secteur de la cosmétique.

De plus, il faut savoir déléguer des tâches basiques de son entreprise à ses subordonnés. C’est l’une des erreurs que j’ai pu faire au commencement. Je pensais économiser de l’argent en m’occupant personnellement de tâches simples bien que chronophages, mais je ne me rendais pas compte que c’était en fait un manque à gagner pour mon entreprise.

Enfin, le réseau est primordial au Chili afin de lancer son Business. Il faut savoir que les cercles de Business sont très restreints et que les chiliens font quasi exclusivement des affaires avec leurs amis ou avec des personnes qui leur ont été recommandées. Cependant, il y a beaucoup de moyens afin de créer une brèche et de se “faufiler” à l’intérieur de ces “castes”. Par exemple, j’ai pu être mis en relation avec des contacts clés du business de la cosmétique au Chili grâce à des parents rencontrés à la sortie d’école de ma fille. Ces personnes là ne m’auraient jamais octroyer un rendez-vous si je n’avais pas été mis en contact par un tiers.

Encore une fois, cela dépend du domaine d’activité mais il est très important d’utiliser massivement les réseaux sociaux au Chili pour promouvoir sa marque. A noter que le Chili est l’un des pays du globe où les jeunes utilisent le plus les réseaux sociaux, ils y passent plus de 3 heures par jour, bien plus que la moyenne européenne. Le mieux est encore de faire tester ses produits par des influenceurs qui pourront relayer massivement la marque sur les reseaux sociaux. C’est un marché hyper inspirationnel ! »

 

Aurais-tu un livre à conseiller ?

« Je suis un grand fan de livres d’aventure et l’un d’eux m’a tout particulièrement marqué: “Paris- Saigon” de Jean-Baptiste Flichy et Edouard Cortès. C’est le récit de deux passionnés de voyages qui ont parcourus 16 000 km à 2CV jusqu’en Asie du Sud-Est. Je l’ai lu en Janvier en moins de 2 jours et 4 mois plus tard j’annonçai à mes parents que je m’en allais faire un tour du monde à vélo. »

Une belle coïncidence pour nous d’avoir rencontré Jean-Gabriel puisqu’il a eu la chance de réaliser son rêve et a entrepris un tour du monde à vélo en 2007 à la rencontre d’initiatives positives pour aider les personnes en situation de handicap mental (Expédition Xtraordinaire).

 

Merci beaucoup Jean-Gabriel !

 

 

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