« En l’espace de trente ans, le Chili s’est hissé à la tête des pays exportateurs de vins du Nouveau Monde. En effet, le pays est doté de conditions idéales pour la culture des vignes »

 

Rencontre avec Grant Phelps, fondateur et gérant de WineBox, un concept alliant appartement/hôtel et cave à vin.

Nous rencontrons aujourd’hui Grant Phelps, originaire de Nouvelle Zélande et ayant fondé WineBox.

Comment es tu arrivé au Chili ?

« Je suis arrivé au Chili il y a maintenant un peu plus de 15 ans en travaillant en tant que vigneron pour le vignoble Casas del Bosque, un des grands vignobles chilien.
Ce vignoble exporte la majorité de sa production à l’étranger, ce qui m’a donné l’opportunité de voyager énormément à travers le monde. À la fois passionnant et épuisant, il fallait que je trouve un endroit pour me poser, j’ai donc choisi le Chili. »

 

Quel est le contexte du vin au Chili ?

« En l’espace de trente ans, le Chili s’est hissé à la tête des pays exportateurs de vins du Nouveau Monde. En effet, le pays est doté de conditions idéales pour la culture des vignes. La composition du sol, le climat très ensoleillé, les espaces vierges, tous ces éléments font du Chili un « eldorado » pour la culture des vignes, notamment au pied de la cordillère des Andes, dans la région de Maipo. Cela offre en parallèle une grande diversité de terroirs.

Le marché du vin chilien repose principalement sur les exportations. Il faut savoir que celui-ci est dominé par les géants, les grandes wineries telles que “Concha y toro” et ses 320 hectares de vignes, ou “Casas del Bosque”. Cette production de masse permet de proposer à la clientèle du vin peu cher, d’une qualité correcte. Par conséquent, les chiliens boivent en général des vins aux prix abordables et ne sont pas aptes à dépenser davantage pour des vins plus prestigieux.

Le manque d’histoire dans le domaine du vin au Chili.

En tant que spiritueux, lorsque l’on vend du vin il faut un contexte sur son origine, son histoire. Le Chili fait face à un véritable problème d’identité et cela représente l’un des plus gros challenges au niveau du business.
Le contexte est compliqué car la majorité de la population dans le monde n’a que peu de connaissances sur le Chili, sur ses paysages et sa géographie.

Par ailleurs, on constate un problème d’identité au niveau du vin en lui même. Il n’y pas de marques emblématiques. L’offre est très variée mais cela se fait au détriment de la qualité du vin. Par conséquent, il n’y a que très peu de spécialisations et donc de vins de grandes qualités. De là repose l’un des principaux défis de cette économie : donner aux vignobles chiliens une image haut de gamme pour défier les grands crus français. »

 

Peux-tu nous parler de ton business : WineBox ?

« J’ai décidé de me lancer dans ce projet un peu fou alliant hôtellerie et vin en créant des appartements hôtels, avec une cave à vin au sous-sol.

Valparaiso est une ville que j’aime, pour son architecture, son atmosphère et son côté multiculturel. C’est la deuxième ville la plus visitée au Chili mais il n’y a pas de vin dans cette ville. L’offre pour le vin est vraiment pauvre ici. Les vignobles sont trop éloignés de Valparaiso.

Visiter les vignobles représente un coût très important et cela ne fonctionne pas de la même manière qu’en France. Il faut payer pour tout, la visite, le déjeuner, le trajet, ce qui freine certains touristes et passionnés.

Mon souhait est de rendre accessible la culture du vin à un maximum de personnes. L’idée avec WineBox est de vendre de bonnes bouteilles de vin au cœur de Valparaiso et de proposer directement aux clients de l’hôtel des verres au détail. Je souhaite élargir l’offre proposée dans cette ville et apporter un plus.

Le concept de WineBox est assez unique et original. L’architecture apporte quelque chose de nouveau à cette ville de Valparaiso, notamment l’image d’une ville portuaire.

Les appartements-hôtels de WineBox ont été inspirés de la reconstruction de la ville de Christchurch en Nouvelle Zélande, suite au tremblement de terre ayant détruit la ville en 2011. Afin de reconstruire celle-ci rapidement, la municipalité a utilisé temporairement des conteneurs pour les logements et les bureaux afin de pallier à l’urgence. Cette reconstruction m’a beaucoup inspiré et m’a donné envie d’adopter le même principe ici, à Valparaiso. Naturellement, je voulais que le vin soit impliqué dans ce projet, de là est né WineBox.

Je me suis donc lancé dans cette aventure avec Camila Ulloa, une architecte chilienne qui m’a permis de réaliser ce rêve et de contribuer à l’originalité de la ville de Valparaiso.

Avec Winebox et notre cave en sous-sol, nous fabriquons nous même notre propre vin. Nous pouvons appeler cela du vin urbain.

Concernant la partie appartement-hôtel, chaque conteneur abrite un appartement. L’architecture a été pensée et réalisée de manière éco-responsable en utilisant uniquement des matériaux recyclés. Autrement dit, toutes les tables, les sièges, les portes, le mobilier sont faits de palettes recyclées, de conteneurs, d’ancien tonneaux de vin, de baignoires découpées etc…

Par ailleurs, outre l’architecture extérieure de WineBox, ce concept n’aurait pas de sens sans l’esprit de Valparaiso, les graffitis. Ainsi, de nombreux artistes du monde entier sont venus décorer les différentes pièces de manière bénévole, notamment Haylee Fieldes.

Pour finir, nous sommes actuellement en train d’ouvrir un bar à vin et un shop au dernier étage, offrant une vue à 360° sur la ville de Valparaiso. »

 

As-tu rencontré des difficultés dans la mise en place de WineBox ?

« Ma principale difficulté a été l’obtention des différents permis de construire avec la municipalité. Ici, tout est très lent et tout est paradoxal. À Valparaiso, je suppose que seulement 5% des habitations ont été faites sous les codes architecturaux. Cependant, à partir du moment où la construction d’un bien se fait à des fins commerciales, tout est plus compliqué, il faut suivre toutes les règles à la lettre.

Par ailleurs, faire accepter le projet au voisinage n’a pas été si facile dû au changement de décors.

Ensuite, nous avons eu de grosses difficultés à ramener le matériel et les engins pour monter et assembler les conteneurs entre eux.

En outre, nous souhaitons pouvoir faire profiter de notre vin à la clientèle et nous sommes actuellement en train de finir la construction de notre bar au dernier étage. Cependant, la licence pour vendre de l’alcool peut prendre jusqu’à 3/4 ans pour pouvoir l’obtenir. Les démarches sont très longues et compliquées car il y a de nombreux intermédiaires.

Pour finir, les banques ne veulent pas prendre de risques. Elles ne financent pas directement le business et il est difficile d’obtenir un prêt. »

Merci Grant !

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